La chasse aux papillons
Un bon petit diable à la fleur de l'âge,
la jambe légère et l'œil polisson
et la bouche pleine de joyeux ramages,
allait à la chasse aux papillons.
Comme il atteignait l'orée du village,
filant sa quenouille, il vit Cendrillon,
il lui dit : "Bonjour, que Dieu te ménage,
j' t'emmène à la chasse aux papillons."
Cendrillon ravi' de quitter sa cage
let sa robe neuve et ses botillons ;
et bras d'ssus bras d'ssous vers les frais bocages
ils vont à la chasse aux papillons.
Ils ne savaient pas que sous les ombrages
se cachait l'amour et son aiguillon
et qu'il transperçait les cœurs de leur âge,
les cœurs des chasseurs de papillons.
Quand il se fit tendre, ell’ lui dit : "J' présage
qu' c'est pas dans les plis de mon cotillon,
ni dans l'échancrure de mon corsage,
qu'on va à la chasse aux papillons."
Sur sa bouche en feu qui criait : "Sois sage !"
il posa sa bouche en guis’ de bâillon
et c'fut l'plus charmant des remu’-ménage
qu'on ait vu d' mémoir' de papillon.
Un volcan dans l'âme, i’ r'vinr’nt au village,
en se promettant d'aller des millions,
des milliards de fois, et mêm' davantage,
ensemble à la chasse aux papillons.
Mais tant qu'ils s'aim'ront, tant que les nuages,
porteurs de chagrins, les épargneront,
il f'ra bon voler dans les frais bocages,
ils f'ront pas la chasse aux papillons.