Les croquants
Les croquants vont en ville, à cheval sur leurs sous,
acheter des pucelle' aux saintes bonnes gens,
les croquants leur mett'nt à prix d'argent
la main dessus, la main dessous...
Mais la chair de Lisa, la chair fraîch' de Lison
(que les culs cousus d'or se fass'nt une raison !)
c'est pour la bouch' du premier venu
qui' a les yeux tendre' et les mains nues...
Les croquants, ça les attriste, ça
les étonne, les étonne
qu'une fille, une fill' bell' comm' ça,
s'abandonne, s'abandonne
au premier ostrogoth venu :
les croquants, ça tombe des nues.
Les fill's de bonnes moeurs, les fill's de bonne vie,
qui' ont vendu leur fleurette à la foire à l'encan,
vont s'vautrer dans la couch' des croquants,
quand les croquants en ont envie...
Mais la chair de Lisa, la chair fraîch' de Lison
(que les culs cousus d'or se fass'nt une raison !)
n'a jamais accordé ses faveurs
à contre-sous, à contrecœur.
Les croquants, ça les attriste, ça
les étonne, les étonne
qu'une fille, une fill' bell' comm' ça,
s'abandonne, s'abandonne
au premier ostrogoth venu :
les croquants, ça tombe des nues.
Les fill's de bonne voie ont le cœur consistant
et la fleur qu'on y trouve est garanti' longtemps,
comm' les fleurs en papier des chapeaux,
les fleurs en pierre des tombeaux...
Mais le cœur de Lisa, le grand cœur de Lison
aime faire peau neuve avec chaque saison :
jamais deux fois la même couleur,
jamais deux fois la même fleur...
Les croquants, ça les attriste, ça
les étonne, les étonne
qu'une fille, une fill' bell' comm' ça,
s'abandonne, s'abandonne
au premier ostrogoth venu :
les croquants, ça tombe des nues.